Création d’un club Canada pour stimuler les échanges commerciaux et les investissements, lancement d’une « année de l’innovation franco-québécoise », déplacement à venir du ministre en charge du Commerce extérieur Olivier Becht… Le Canada a le vent en poupe et a besoin de savoir-faire français pour réaliser sa transition énergétique. En témoigne la journée que lui a consacré Business France le 6 décembre.
Rares sont les pays affichant des perspectives de croissance de leur PIB pour 2023. C’est le cas du Canada avec + 1,8 % selon les prévisions d’Allianz Trade. « Les exportations de céréales et d’hydrocarbures ont soutenu la croissance du pays », analyse Ano Kuhanathan, économiste chez l’assureur-crédit. En 2021, les exportations françaises y ont bondi de 15 % pour atteindre 3,6 milliards d’euros, faisant de la France son quatrième fournisseur européen, derrière l’Allemagne, l’Italie et le Royaume-Uni.
Ces échanges ont été dynamisés par la mise en place en 2017 du volet commercial de l’accord de libre-échange avec l’Union européenne (UE), le CETA (Comprehensive Economic and Trade Agreement). Selon Business France, « l’accord commercial de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada (CETA) a contribué à stimuler les échanges, avec + 3,5 % de taux de croissance annuelle moyen des exportations entre 2016 et 2020 ».
Pour le ministre français en charge du Commerce extérieur, Olivier Becht, « le CETA n’a pas provoqué de catastrophe, au contraire : les échanges agricoles ont augmenté de 30 % et dans la filière bovine, il y a trois fois plus d’exportations françaises au Canada que d’exportations canadiennes en France ».
Les exportations françaises ont bondi de 20 % en cinq ans
L’agroalimentaire, qui représente à lui seul près du quart des montants exportés, a crû de 12,5 % en 2021, porté notamment par les ventes de vin. Les machines et équipements (20,5 % des exportations) et les produits chimiques, y compris les parfums et les cosmétiques (11,5 %) ont également bénéficié de la vigueur de la reprise des échanges commerciaux et ont connu des hausses de respectivement 19,5 % et 17 %.
En revanche, le secteur pharmaceutique, favorisé par le contexte sanitaire en 2020, connaît une légère baisse de ses montants d’exportations en 2021 (- 1 %). La baisse des ventes des matériels de transport (- 10 %) s’explique quant à elle par le recul des ventes des produits issus de l’industrie aéronautique, qui n’a pas été compensé par la progression du secteur automobile.
« Les exportations françaises ont bondi de plus de 20 % en cinq ans, souligne Stéphane Lambert délégué commercial principal à l’Ambassade du Canada en France. Elles ont augmenté à destination des provinces, notamment l’Ontario, la Nouvelle-Ecosse et aussi dans l’Ouest du pays. » Des régions qui cherchent également à attirer des investisseurs.
Favoriser les investissements directs dans les deux sens était d’ailleurs l’objectif de ce forum dédié à l’implantation des entreprises françaises au Canada et à celle de leurs consoeurs canadiennes dans l’Hexagone .
D’importantes opportunités
dans les secteurs de la transition énergétique
Et il n’y a pas que dans les secteurs traditionnels des échanges bilatéraux que le demande canadienne d’importations ou d’investissements est forte. « Pour réaliser la transition énergétique le budget fédéral estime les investissements entre 125 et 140 milliards de dollars canadiens par an alors qu’ils oscillent entre 15 et 25 milliards, rappelle l’ambassadeur du Canada en France, Stéphane Dion. Il y a un écart à combler ! »
Pour Ano Kuhanathan, « avec des niveaux d’émissions de gaz à effet de serre similaires aux pays du Golfe, le Canada a de gros efforts à faire dans le domaine des énergies renouvelables et les technologies françaises ont un rôle à jouer ».
C’est ce qu’a bien compris l’entreprise de recyclage Derichebourg Environnement lorsqu’elle a pris pied sur le marché canadien en 2014. « Lorsque nous avons démarché les collectivités nous avons présenté des offres avec la même exigence en termes de RSE qu’en France et c’est ce qui a fait la différence, se souvient Thomas Derichebourg, son président. Nous avons également associé des startup locales pour améliorer encore nos performances : c’est grâce à une technologie québécoise que nous avons diminué les gaz à effet de serre de nos camions. »
Ne pas négliger l’aspect culturel
Enfin, le Canada est évidemment une porte d’entrée sur la marché états-unien. Technilum, spécialiste du mobilier urbain, a ainsi développer un réseau d’agents au Québec, puis dans d’autres provinces canadiennes, avant de franchir la frontière. « Nous sommes allés sur des salons professionnels à New York et à Las Vegas avec des références québécoises, ce qui nous a aidé à être identifiés, et le Québec nous a permis de nous familiariser avec la mentalité nord-américaine », estime Benoît Saes, directeur commercial de cette PME héraultaise.
Erreur fréquente chez les Français, « le Québec ce n’est pas la France en Amérique, mais l’Amérique en français, insiste Jean-François Lupien, directeur des investissements directs étrangers du bureau parisien d’Investissement Québec International. Les Américains sont très transactionnels car ils considèrent que business is business tandis que les Français prennent le temps de construire une relation avec leur client. »
Reste qu’au Québec comme dans les autres provinces, les opportunités sont importantes dans des secteurs innovants et les savoir-faire français y ont bonne presse. Les entreprises s’intéressant au marché québécois pourront trouver à s’informer (et à prospecter) dans le programme d’événements de l’année de l’innovation québécoise. Avant de conquérir d’autres provinces… et, pourquoi pas, de passer la frontière.
Sophie Creusillet
Pour approfondir :
–www.investircanada.ca/
-Club Canada, contact : [email protected]
-CCI France-Canada : www.ccifcmtl.ca/