Une certaine forme de protectionnisme, dans le cadre d’une politique de réciprocité à l’égard des grands partenaires commerciaux de l’Union européenne – États-Unis, Chine – est nécessaire pour favoriser la réindustrialisation affirme Bruno Le Maire dans une interview accordée à quatre journaux européens, dont Les Echos. Mais il faudra convaincre à Bruxelles.
Le ministre français de l’Économie, des finances et de la souveraineté industrielle, n’en démord pas : « le véritable risque européen, c’est le décrochage technologique, industriel et économique, qui laisserait le champ libre aux États-Unis et à la Chine, estime-t-il dans une interview accordée à quatre journaux européens le 7 novembre, dont Les Echos. Donnons-nous les moyens de réindustrialiser l’Europe pour rester une grande puissance industrielle mondiale. »
Bruno Le Maire s’était déjà montré favorable à cette idée pour la filière automobile électrique européenne, sur la même longueur d’onde que le président Emmanuel Macron. Dans cette interview, il défend cette ligne pour l’ensemble des filières industrielles. Dans le contexte où la flambée des prix de l’énergie touche davantage l’Europe que les États-Unis, « les subventions massives prévues par le Inflation Reduction Act (IRA) américain et la concurrence chinoise, également fortement subventionnée, risquent de creuser davantage cet écart » prévient le ministre.
Il voit deux piliers à la stratégie à mettre en œuvre pour protéger activement les projets industriels de l’Europe : le premier est la mise en œuvre de mesures de réciprocité par Bruxelles. « Cela peut passer par une affirmation plus stricte de nos intérêts environnementaux, par des dispositifs de préférence européenne ou par l’accélération de l’utilisation des instruments de réciprocité que nous avons mis en place sous présidence française du Conseil de l’Union européenne, comme le règlement de contrôle des aides d’État des pays tiers » argumente le ministre. Deuxième pilier, « baisser les prix de l’énergie ».
Insistant sur la menace que constitue la politique de subvention américaine il indique que « dans certains cas, le montant des subventions que l’administration Biden propose est quatre à dix fois le montant maximal autorisé par la Commission européenne ». Faudra-t-il aller jusqu’à attaquer les États-Unis à l’OMC ? Le ministre se montre plus évasif sans l’exclure : « nous regardons tous les leviers qui sont à notre disposition. L’Europe doit défendre ses intérêts. Personne ne lui fera de cadeau, ni la Chine ni les États-Unis ». Une éventuelle plainte à l’OMC est du ressort de la Commission mais nécessiterait un consensus au sein des États membres.
C.G