Le marché de l’énergie en Algérie, ce n’est pas que le gaz ! Très courtisée par les pays européens soucieux de trouver une alternative à la Russie pour leur approvisionnement en gaz, l’Algérie, où Emmanuel Macron vient d’effectuer une visite de trois jours, s’est engagée depuis plusieurs années à développer sa production d’énergies renouvelables. Les projets se multiplient, le marché est en plein boum, générant de nombreuses opportunités. Revue de détail.
Si les questions mémorielles étaient au centre du déplacement du président français, dont l’objectif officiel était d’apaiser les tensions entre Paris et Alger, celles liées aux exportations de gaz vers la France ont bien été abordées. Catherine MacGregor, la directrice générale d’Engie, faisait partie de l’importante délégation française (90 personnes en tout) et a rencontré le ministre algérien de l’Energie et des mines ainsi que le patron de Sonatrach, géant pétrolier et gazier algérien.
Mais au-delà de cet enjeu, le 10e producteur mondial de gaz, qui couvre 11 % des importations européennes, table sur son important potentiel éolien et solaire pour engager sa transition énergétique. Signent de leur importance pour le gouvernement, les énergies renouvelables bénéficient d’un ministère dédié depuis juin 2020. Alors qu’elles ne représentent que 3 % de la production d’électricité, les autorités algériennes souhaitent augmenter cette part à 27 % en 2035 et développent de grands projets, avec à la clé des appels d’offres.
Frénésie de projets dans les ENR
Parmi ces grands projets, citons :
– Solar 1 000 MW – Ce méga projet prévoit la construction d’installations solaires de production d’électricité d’une puissance totale de 1000 MWc (mégawatts-crête). L’appel d’offre, dont la clôture a été repoussée plusieurs fois, est toujours en cours.
– Hybridation de centrales conventionnelles – La SKTM (Shariket el Kahraba wa el Taket el Moutadjadidat, « société d’électricité et des énergies renouvelables »), filiale du groupe Sonelgaz, prévoit de réaliser d’ici 2024 200 MWc solaire photovoltaïque en hybridation de centrales conventionnelles des réseaux électriques isolés du Sud. Un premier lot de 50 MWc a été lancé en réalisation en 2020, et en juillet 2021 un appel d’offres a été lancé pour la réalisation d’une puissance totale de 21 MWc répartie sur 3 centrales.
– La Sonatrach (Société nationale pour la recherche, la production, le transport, la transformation, et la commercialisation des hydrocarbures) prévoit d’équiper ses sites de production d’une capacité solaire totale de 1,3 GWc d’ici 2030. En 2018, elle a signé avec Total un accord pour identifier de nouvelles opportunités de projets dans le domaine des énergies renouvelables.
– Eclairage public – Un programme du ministère de l’Intérieur et des collectivités locales prévoit d’installer des panneaux photovoltaïques pour alimenter les bâtiments publics et le réseau d’éclairage public. Il a donné lieu à la mise en place d’un référentiel.
– Exploitations agricoles – Un programme similaire a également été lancé pour équiper des agriculteurs isolés en panneaux photovoltaïques ou en éoliennes.
– Hydrogène – En mai dernier, la Sonatrach et l’italien Eni ont signé un accord sur l’accélération du développement des champs gaziers récemment découverts en Algérie. Il porte également sur un projet expérimental d’hydrogène vert visant à réduire l’empreinte carbone de la production de gaz sur le champ de Bir Rebaa Nord.
Les hydrocarbures ne sont pas pour autant mis de côté
A l’origine de 97 % de la production d’électricité, le gaz et le pétrole ne sont pas près de disparaître du mix électrique algérien, mais l’outil industriel est vieillissant, ce qui limite, d’ailleurs, la capacité du pays à répondre aux demandes d’augmentation des livraisons par les Européens. D’où, là encore, des projets qui émergent.
40 milliards de dollars (Md USD) doivent être investis dans l’exploration, la production et le raffinage du pétrole ainsi que la prospection et l’extraction du gaz. Car le pays a besoin des revenus que procure leur vente sur les marchés étrangers. Selon le site Tout sur l’Algérie (TSA), qui se fonde sur les prévisions du FMI, leur exportation pourrait rapporter 58 Md USD en 2022, contre 34 Md USD, l’année précédente.
Aujourd’hui, les revenus tirés des exportations de gaz et de pétrole représentent 60 % du budget de l’Etat algérien.
Sophie Creusillet