Une intéressante étude de la Banque de France, parue dans son dernier Bulletin* montre que les grands groupes bancaires français font partie des plus internationalisés au monde. Ils ont toutefois opéré un recentrage dans la zone euro, notamment à partir de 2014, stimulé par l’intégration du marché bancaire à l’intérieur de cette dernière.
Les grands groupes bancaires étudiés dans ce Bulletin (BNP Paribas, Groupe BPCE, Groupe Crédit Agricole, Groupe Crédit Mutuel, Société Générale et HSBC Continental Europe) totalisaient, fin 2021, un montant total d’actifs consolidés de 8 073 milliards d’euros, représentant 86 % de l’ensemble du secteur bancaire français. Considérés en Europe comme « des banques importantes », quatre d’entre eux (BNP Paribas, BPCE, Crédit Agricole et Société Générale) sont indentifiés comme des « banques d’importance systémique mondiale ».
Avec 39 % de leurs engagements totaux à l’international, soit 3764 milliards d’euros (Md EUR) fin 2021, leur taux d’internationalisation est parmi les plus importants au monde, loin devant ceux des banques au Japon (21 %), aux Etats-Unis (24 %) et en Allemagne (25 %). Ils sont toutefois devancés, dans ce domaine, par d’autres groupes bancaires européens, dont ceux du Royaume-Uni (56 %), d’Espagne (49 %), des Pays-Bas (49 %) et de Suisse (47 %). Ce taux d’internationalisation est stable depuis 2017.
L’internationalisation s’est faite principalement, selon l’étude, via des filiales locales, en majorité des établissements de crédit : ces filiales génèrent plus de la moitié des engagements internationaux des banques étudiées. Les pays développés concentrent la plus importante partie de ces engagements, avec en tête l’Europe, et notamment la zone euro, qui s’est renforcée ces dernières années : la zone euro représentait, fin 2021, 39 % des engagements internationaux (contre 27 % hors France en 2005), devant le reste de l’OCDE.
Logiquement, ces engagements se concentrent dans les pays frontaliers, où certains groupes bancaires français disposent de filiales puissantes : Italie, Belgique, Allemagne, Luxembourg, Espagne, Pays-Bas, Irlande, Portugal.
Par grandes zones géographiques, les contreparties des grands groupes bancaires français se trouvent à 53 % en Europe, suivie de l’Amérique (26 %) et de l’Asie (16 %). Les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du sud) ne pèsent que 6 %. L’Afrique est très minoritaire : l’exposition dépasse 5 milliards d’euros dans quelques pays seulement. En majorité, les contreparties sont des entités non financières.
La poussée de l’Union bancaire en zone euro
Les engagements en zone euro, à commencer par les pays frontaliers de la France, se sont renforcés ces dernières années, comme le remarque la note de la Banque de France, à la faveur des avancées du processus d’unification bancaire : mise en place du Mécanisme de surveillance unique (MSU) en 2014, puis du Mécanisme de résolution unique (MRU) en 2015, sous l’égide de la Banque centrale européenne.
Résultat, « les risques intra-Union bancaire portés par les banques peuvent dans certaines réglementations être partiellement assimilés à des risques nationaux », se félicité la Banque de France.
D’après la note, cet ancrage dans la zone euro et la diversification géographique des autres engagements internationaux a plutôt aidé les banques concernées à affronter les crises internationales successives depuis 2008, tout en les incitant à le renforcer : crise financière, crise des dettes souveraines, crise Covid, et cette année guerre en Ukraine.
D’après la Banque de France, fin 2021, soit avant l’agression de l’Ukraine par la Russie, le montant total des engagements des six grands groupes bancaires étudiés, à près de la moitié dans des entreprises, représentait une part modeste de leurs engagements : 0,8 % pour la Russie (31,3 Md EUR) et 0,1 % pour l’Ukraine (3,7 Md EUR). « Les expositions directes des grands groupes bancaires français en Russie et en Ukraine sont donc très limités, à l’exception d’une banque [Ndrl : la Société Générale], qui a depuis procédé à la cession de sa filiale, avec un effet limité sur sa solvabilité » considère la note.
De fait, exposition internationale diversifiée s’accompagne d’un risque de crédit relativement maîtrisé : à fin 2021, après une période d’assainissement, le taux de prêts « non performants » serait de 2,7 % (contre 4,1 % en 2018), contre 1,6 % pour le marché national, et ils « sont généralement localisés dans des pays où les expositions des banques françaises sont relativement limitées ».
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*Bulletin de la Banque de France 241/4, juillet août 2022.