L´armateur français, Louis Dreyfus Armateurs, a démarré le 18 septembre dernier, son premier service de roulier mixte (passagers camions) pour transporter à la fois des poids-lourds et leurs chauffeurs et relier Montoir-de-Bretagne (Saint-Nazaire) à Gijón (Espagne). L´objectif est de capter une bonne partie du trafic fret routier entre le Benelux, Le Royaume-Uni et l´Espagne et soulager ainsi des réseaux routiers saturés. Cette nouvelle liaison, baptisée « autoroute de la mer », a reçu un accueil mitigé, voir indifférent un certain nombre de transporteurs routiers français, qui lui reprochent sa non-viabilité économique et son inadéquation à leurs besoins de réactivité et de vitesse. Interrogé par Le Moci, Antoine Person, secrétaire général de l´armateur leur répond.
Le Moci. La première autoroute de la mer entre la France et l´Espagne peut-elle être rentable d´ici 3 ans ?
Antoine Person : Oui. Nous espérons bien être rentables avant. En tout cas, bien avant que le soutien des Etats et de l´Union Européenne ne cesse. Chaque jour, cinq mille camions passent à Biriatou [ndlr : village du pays Basque], au point de franchissement entre la France et l´Espagne. 40 % de ces véhicules sont en transit vers d´autres destinations que la France. C´est ce flux là, qui nous semble avoir le plus vocation à emprunter la première autoroute de la mer. Dans un premier temps, nous souhaiterions pouvoir embarquer sur notre navire 25 000 camions par an, ce qui correspondrait, avec trois rotations par semaine, à un taux de remplissage de 70 % du navire. Et avec ces 70 %, nous atteignons notre point mort.
Le Moci. Peut-on parler d´autoroute de la mer avec 3 rotations par semaine et 15 camions par navire ?
Antoine Person : Un navire tous les deux jours, c´est insuffisant. Nous ne l´ignorons pas et nous espérons bien doubler le nombre de rotations avant deux ans. Quant aux nombre de camions, il augmente déjà sensiblement : nous avons embarqué une vingtaine de poids lourds lors de nos dernières rotations. Autre raison d´y croire, certains transporteurs espagnols nous ont indiqué vouloir conclure un contrat annuel sur cette ligne. C´est très encourageant. C´est vrai aussi, nos premiers clients sont essentiellement des transporteurs routiers portugais, espagnols ou britanniques, très peu de Français.
Le Moci. Justement, qu´en pensez-vous ?
Antoine Person : Dans ce projet, il ne s´agit pas de supplanter la route, mais de réconcilier, les entreprises et les citoyens avec le transport maritime. Bien sûr nous n´irons pas capter du trafic de cabotage routier français sur courte distance. Mais, les transporteurs français ont aussi un intérêt économique à emprunter une liaison parfaitement fiable pour leurs trajets plus longs.
Propos recueillis par Gilles Naudy