Nouvelle filiale de Medef International créée il y a un an, Encaf a pour ambition de développer avec des partenaires un catalogue numérisé et mutualisé de contenus pédagogiques orientés sur des métiers techniques dont ont besoin les entreprises en Afrique. Elle a signé le 24 août ses premiers accords avec des organismes de formation africains et français (notre photo), en marge de la première Rencontre des entrepreneurs francophones (LaREF21) organisée par le Medef à Paris.
Encaf signifie “Ecosystème numérique international pour les compétences métier”. Et la REF21, qui a rassemblée pour la première fois 27 délégations patronales de l’espace francophone à Paris, était bien le cadre idéal pour attirer de nouveaux partenaires dans cette initiative portée par Medef International (Medefi), et en particulier le président de son comité Afrique, Momar Nguer.
Son objectif : contribuer à combler les besoins gigantesques du continent africain en formations professionnelles et techniques grâce à une offre de contenus pédagogiques numérisés et à une approche partenariale avec les organismes et dispositifs existants en Afrique.
Un des premiers à signer un accord avec Encaf ne s’y est pas trompé : “nous avons d’abord vérifier que cela ne faisait pas concurrence à nos centres au Sénégal” a expliqué Antoine Ngom, vice-président du Conseil national du patronat du Sénégal (CNP Sénégal) et vice-président de sa commission Optic. C’est bien une démarche de mutualisation”.
Pénurie de techniciens africains
Même ton pour Lucien Guilao, directeur général de l’ONFPP de Guinée, pour qui “le numérique peut nous permettre de rattraper notre retard dans la formation”. Selon Mohamed Yiremba Sidibé, directeur général du groupe BCEIP, une société guinéenne spécialisée dans le recrutement de RH, trouver un soudeur serait un casse-tête dans son pays, obligeant à aller chercher en Côte d’Ivoire voisine.
Une pénurie dont souffre aussi de nombreuses entreprises étrangères qui s’implantent ou développent des projets en Afrique, dont les françaises, qui l’évoquent régulièrement dans les enquêtes d’opinions comme un frein à leur développement.
« Nous sommes ici pour marquer notre engagement collectif à relever le défi de la formation professionnelle technique de nos pays respectifs” a tenu a rappelé Yves Dambach, en charge de l’E-Formation chez Medefi et qui dirige l’Encaf. La mutualisation des ressources, associée aux outils numériques qui facilitent leurs diffusion, est pour lui le seul moyen d’espérer parvenir à relever le défi de la formation des jeunes Africains qui arrivent par centaines de milliers sur les marchés du travail chaque année en rendant possible une “massification” de la démarche.
Les domaines de formation concernés sont multiples, de la logistique à la mécanique en passant par les métiers de l’industrie, du numérique ou encore du maritime. La numérisation des modules de formation sur ces sujets techniques nécessite des fonds importants. Le CEFCM (Centre européen de formation continue au maritime) de Concarneau, qui est déjà en partenariat avec l’Ecole nationale maritime de Dakar, a ainsi décidé de signer lui aussi un accord avec Encaf pour développer des modules pilotes avec son partenaire sénégalais et de les proposer dans toute la sous-région.
Une jeune pouce et trois piliers
Le plan d’affaires d’Encaf, qui est pour le moment une jeune pouce à la structure légère, avec une équipe de permanents prêtés ou détachés par Medefi, repose sur trois grands piliers :
-créer un catalogue de contenus et de données visant à renforcer les ressources pédagogiques des centres de formation en Afrique;
-développer des infrastructures sous la forme de cyber-centres de formation sédentaires et mobiles, qui se déplaceraient sur les lieux où les besoins s’expriment (par exemple, des chantiers) grâce à un dispositif logés dans des conteneurs et chargés sur des camions.
-et enfin délivrer les services en s’appuyant sur le réseau des organismes de formation partenaires.
Aucun partenariat n’est écarté, y compris avec des gouvernements ou des organisations internationales. Le gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC) est intéressé par l’expérience de mise en œuvre de la Guinée et du Sénégal et a aussi signé un accord. Le Programme alimentaire mondiale pourrait aussi bientôt signer avec Encaf un accord pour développer 4 cyber-centres de formations mobiles axés sur la logistique.
Selon Yves Dambach, Encaf ambitionne de mobiliser 100 millions d’euros avec ses partenaires sur 5 ans pour déployer ce projet. Entreprises privés, gouvernements, organismes de développement bilatéraux (AFD française, GTZ allemande), institutions internationales (Banque mondiale, Banque africaine de développement, Union européenne…), aucune source ne sera négligée, en fonction des projets. “On va co-construire ensemble ce nouveau modèle”, “c’est du disruptif, on construit quelque chose de vraiment nouveau” conclut-il.
Christine Gilguy