Les dernières perspectives de croissance de Coface dessinent un monde à deux vitesses, en raison d’une répartition et d’une intensité inégales des campagnes de vaccination. Le commerce mondial devrait néanmoins croître de 11 % en 2021 et la croissance mondiale de 5,6 %. Le risque politique plane cependant sur cette reprise de l’économie mondiale.
Bonne nouvelle : Coface a revu à la hausse ses perspectives de croissance mondiale, passant de 5,1 % à 5,6 %. Ce regain de croissance est néanmoins largement imputable aux États-Unis (+ 6,5 % cette année) dont l’économie ne cesse du surprendre favorablement depuis l’été dernier la mise en œuvre du plan d’infrastructure annoncé par Joe Biden devrait profiter à de nombreux secteurs d’activité.
En Amérique du Nord comme en Europe, l’accélération des campagnes de vaccination, conjuguée aux effets des restrictions de mobilité au printemps, ont fait chuter le nombre de nouvelles infections dans ces zones. Les autorités locales ont ainsi pu permettre la réouverture de certains pans de l’économie avant l’été.
Europe et Amérique du Nord : vers la fin des « stop and go » ?
En Europe, le déblocage des fonds du plan de relance annoncé dès le mois de juillet 2020 aura des effets différentiés sur les économies et répondra à des objectifs multiples, souligne l’assureur-crédit : soutenir la demande, accélérer la reprise et favoriser l’essor des secteurs porteurs.
Néanmoins, cette tendance positive pourrait se retourner. En effet, le ralentissement du rythme de vaccination, s’il se confirme dans les prochains mois, retardera l’atteinte de l’immunité collective. En outre, le seuil pour atteindre cette immunité collective est d’autant plus élevé que le virus se transmet rapidement. Or l’apparition de nouveaux variants plus transmissibles fait craindre de possibles nouvelles vagues de contamination dans les mois à venir.
Sous réserve que ces deux risques ne se matérialisent pas, les économies européennes et d’Amérique du Nord devraient avoir retrouvé un fonctionnement quasi-normal d’ici la fin de l’été. Pour les entreprises, une hausse des coûts de production est cependant à prévoir : outre une pénurie persistante de certains composants électroniques, elle touche aussi les coûts du transport, ainsi que les prix des matières premières qui devraient rester élevés.
Économies émergentes : la demande interne contrainte par les « stop and go » et l’inflation
Depuis début d’avril, la situation sanitaire est restée difficile dans plusieurs pays d’Amérique latine (notamment au Brésil et en Argentine) ainsi qu’en Inde.
De nouvelles augmentations du nombre d’infections ont également été observée dans plusieurs pays d’Asie (Malaisie, Thaïlande, Corée et Singapour, par exemple), si bien que les indicateurs à haute fréquence de mobilité indiquent une moindre activité économique dans ces zones.
Le nombre de personnes infectées par le virus a aussi rapidement augmenté en Afrique et en Russie au début de l’été. La tendance est plus favorable en Europe centrale et orientale, au Moyen Orient et en Turquie.
Outre le contexte sanitaire, la hausse de l’inflation (+ 8,1 % sur un an au Brésil, un plus haut depuis 5 ans) et les durcissements de certaines politiques monétaires qui en résultent sont de nature à limiter l’ampleur de la reprise de la demande interne.
Les pays dont les matières représentent une part importante des importations seront pénalisés par une hausse significative de leurs prix importés. C’est le cas pour la Chine dont les importations de matières premières représentent en effet plus de 30 % de ses achats totaux de biens étrangers. Si l’inflation à la consommation reste contenue en Chine à ce stade (+ 1,3 % sur un an), la forte hausse des prix à la production (+ 9 % sur un an, un plus haut depuis 12 ans) plaide pour son accélération dans les mois à venir.
Forte montée des risques politiques liés à l’accélération de l’inflation
Les risques inflationnistes ont fait la une de l’actualité ces derniers mois. Dans ce contexte, l’actualisation annuelle de l’indice Coface fait état d’une forte montée du risque politique dans le monde et notamment dans les pays émergents.
En effet, l’assureur-crédit constate une dégradation des niveaux de vie, du pouvoir d’achat, ainsi que la montée des inégalités observées suite à la crise sanitaire. A ce stade cela ne se traduit pas nécessairement par des révoltes populaires qui restent conditionnées par les capacités de mobilisation des populations.
En 2020, l’indice de risque social a fortement augmenté (+ 5 points) à 51 % au niveau mondial et atteint son plus haut niveau historique. En effet, malgré les nombreuses mesures de soutien budgétaire et monétaire, 140 des 160 pays évalués ont vu leur PIB reculer l’année dernière. Dans le même temps, le taux de chômage a augmenté dans 145 de ces pays.
L’augmentation de ce risque est plus marquée dans les économies à haut revenu, dont le niveau de risque initial est plus bas. Cependant, malgré ces évolutions les pays dont le niveau de risque social est le plus élevé restent le Yémen, la Syrie, l’Irak, le Venezuela, la Libye, le Liban, le Soudan, l’Iran, l’Algérie ou encore l’Arabie Saoudite.
L’indice de conflit, deuxième composante de l’indice Coface des risques politiques, est calculé en fonction du nombre de conflits, de leur intensité, du nombre de victimes et de leur durée. En 2020, l’Azerbaïdjan ou encore l’Ethiopie ont vu une augmentation de cet indice en raison des conflits observés sur leurs territoires. Ils sont suivis par des pays luttant contre le terrorisme, ou en guerre civile, tels que la République Centrafricaine, le Soudan ou encore le Mali.
Par ailleurs, la lente progression de la vaccination dans le monde émergent rend improbable l’atteinte de l’immunité collective au cours des douze prochains mois, estime Coface. Cela laisse penser que des processus de « stop and go » perdureront et continueront de contraindre la demande interne de la plupart des économies émergentes.
SC