Plusieurs collectivités locales de Pologne prévoient de rénover leurs infrastructures. Ces projets sont susceptibles d´être réalisés dans le cadre de partenariats public-privé, dont la législation a été simplifiée début 2009.
Deuxième essai pour la loi sur les partenariats public-privé (PPP) polonaise. Après une première version, publiée en 2005, qui n´avait abouti sur la réalisation d´aucun projet, en raison, entre autres, de la lourdeur administrative qu´elle générait, une nouvelle législation sur les PPP, simplifiée, est entrée en vigueur en Pologne en février 2009. Une autre loi, celle sur les concessions, a également vu le jour en janvier 2009.
Depuis, les autorités polonaises ont organisé une série de conférences internationales pour la faire connaître et attirer les entreprises sur les projets en cours, notamment dans les collectivités locales. À cet égard, les opportunités qu´elle pourrait présenter pour les entreprises françaises, notamment dans le domaine des infrastructures et des services urbains, ont fait l´objet d´un colloque le 9 décembre dernier à Paris, co-organisé par l´ambassade de Pologne en France et le groupe d´amitié France-Pologne au Sénat.
Une base de données sur le site web du ministère polonais de l´Économie, dédiée aux PPP, a été mise en place et permet de suivre certains projets et appels d´offres en cours : elle recense une quarantaine d´idées de projet (http://bazappp.mg.gov.pl/portal/project_base/). Difficile cependant de savoir combien de PPP ont déjà été conclus avec les entreprises étrangères. « Dans la procédure, il n´y a pas de différence entre les sociétés étrangères et polonaises », a expliqué au Moci Jolanta Kacinska-Rossi, juriste au cabinet White & Case et expert auprès de la Chambre de commerce d´industrie française en Pologne.
Reste que les projets intéressent des domaines divers, comme en témoignent ceux qui ont été promus par les collectivités locales lors du colloque. La ville de Poznan, située dans l´ouest de la Pologne, a en projet de moderniser le système de gestion de déchets de la ville en utilisant ce modèle. Son service pour la promotion des investissements a précisé qu´il comptait, pour ce chantier, sur un financement européen à hauteur de 50 %. Poznan envisage également d´impliquer les entreprises dans la construction d´un système de parkings à étages : un appel d´offres était attendu pour ce début d´année 2011. Enfin, la municipalité cherche des investisseurs pour un projet de réaménagement du parc d´attractions « Arena Park ». Valeur de l´opération : 30 millions d´euros.
L´agglomération de Bytom, dans la province de Silésie, au sud du pays, prévoit pour sa part de rénover, via des PPP ou des concessions, un complexe d´hôpitaux ainsi que son stade de football. Elle a également évoqué la construction d´une gare ferroviaire et le réaménagement d´un terrain de golf.
De nombreuses autres collectivités polonaises ont présenté des projets : la ville de Radom pour la rénovation de son stade de foot et de son centre sportif ; Plock avec sa piste de ski et son parc aquatique ; Sopot pour la reconstruction de sa gare ; Gdansk pour son centre des loisirs, ses parkings souterrains et le nouveau bâtiment de sa mairie…
Cette volonté polonaise d´attirer des entreprises et des investisseurs privés dans ce type de projets est à replacer dans le contexte des besoins de modernisation des infrastructures du pays et le climat créé par la tenue de l´Euro 2012 (Coupe d´Europe de football), que la Pologne organise conjointement avec l´Ukraine. Dans la perspective de ce championnat, le pays envisage d´affecter 20 milliards d´euros à la construction des infrastructures, a indiqué lors du colloque la vice-ministre de l´Économie, Grazyna Henclewska.
Ces projets sont d´autant plus intéressants qu´ils peuvent compter en partie sur des financements européens, l´Union européenne étant désormais favorable à l´octroi de fonds structurels pour les projets menés dans le cadre de PPP. La Pologne est l´un des premiers bénéficiaires des fonds structurels depuis son adhésion à l´Union européenne : elle s´est vue attribuer plus de 67 milliards d´euros pour la période comprise entre 2007 et 2013, soit 19,3 % du montant total des fonds structurels, d´après Ubifrance.
Selon le cabinet Salans, les subventions européennes ne peuvent être attribuées qu´à l´entité publique et non au partenaire privé, et peuvent couvrir 85 % des dépenses. La Commission européenne suivra toute la phase de la réalisation du projet et veillera à ce que les subventions soient utilisées selon l´objectif prévu, faute de quoi elles pourront être retirées.
Reste la question de la facilité de mise en œuvre des PPP. D´après un témoignage de Cécilia Tejedor, de Veolia Environnement – groupe présent en Pologne depuis treize ans dans les secteurs de l´énergie et de l´eau et très intéressé par le développement des PPP dans le pays – « les montages peuvent s´avérer complexes, surtout s´ils impliquent des fonds européens ». En outre, d´après elle, les règles d´octroi de ces subventions ne sont pas toujours connues au niveau local, national et surtout européen.
Jolanta Kalecinska-Rossi explique pour sa part que « combiner les partenariats public-privé et les fonds européens est compliqué car il s´agit de deux procédures distinctes et strictes : d´une part, l´obtention des fonds, d´autre part, la sélection du partenaire privé ». Cela reste néanmoins possible et le PPP, qui est un moyen de diminuer la dette publique, va se développer, estime-t-elle. « Une coordination est nécessaire, mais les PPP sont quand même l´avenir ».
Nataša Laporte
Le cadre juridique
Dans le cadre d´un partenariat public-privé, les contrats sont signés entre une entité publique et un partenaire privé, qu´il soit polonais ou étranger. Depuis la nouvelle loi, ces partenaires peuvent créer ensemble une société, comme l´a expliqué le cabinet Salans de Varsovie à l´occasion du colloque. L´objet des contrats est la réalisation commune de projets, basée sur le partage des missions et des risques entre l´entité privée et publique. Ils portent essentiellement sur la construction d´infrastructures, avec les services liés. La sélection du partenaire privé passe par un appel d´offres. Ses modalités dépendent de la source de rémunération du partenaire privé. Quand le partenaire tire profit du bien immobilier, c´est la loi sur les concessions qui s´applique ; dans les autres cas, c´est la loi sur les marchés publics.
N. L.
Un climat favorable
Avec un taux de croissance de 1,7 % en 2009, la Pologne est le seul pays européen à avoir échappé à la récession durant la crise économique mondiale, en raison notamment d´un secteur bancaire sain et d´une faible dépendance aux échanges extérieurs, selon Ubifrance. En 2010, avec le rebond, elle pourrait dépasser les 3 %. Le moteur principal ? « Le modèle économique polonais continue d´être stimulé par la demande intérieure, notamment la consommation privée », explique Alexandre Proisy, économiste chez Natixis. Un bémol : le déficit public a atteint en 2009 plus de 7 % du PIB. Par ailleurs « le zloty, à l´image des devises émergentes, est sensible aux dégradations du sentiment de marché comme ce fut le cas lors de la crise irlandaise », indique l´économiste.
En 2009, la Pologne a concentré près de 40 % des exportations françaises en Europe centrale – ce qui représente environ 5 milliards d´euros –, majoritairement des équipements électromécaniques et des produits chimiques. La Pologne se place désormais en tête des partenaires commerciaux de l´Hexagone dans cette zone.
À l´inverse, la France a été le 4e partenaire commercial de la Pologne en 2009. Elle lui achète surtout des équipements mécaniques. Les échanges franco-polonais ont progressé de plus de 19 % cette année-là pour atteindre 10,8 milliards d´euros, selon Ubifrance. Toutefois, la France enregistre, depuis 2009, un solde déficitaire de l´ordre de 1 milliard d´euros avec la Pologne, d´après l´ambassade de ce pays.
Par ailleurs, l´Hexagone est le 3e investisseur dans le pays. Ses entreprises y sont concentrées dans les secteurs de l´énergie, de la grande distribution et des télécommunications, notamment depuis la prise de participation stratégique de France Télécom au capital de Telekomunikacja Polska.
N. L.