Les choses changent un peu au Turkménistan. Côté économique, le régime semble s´ouvrir, à mesure qu´il lui est nécessaire de s´inscrire dans les échanges globalisés.
Certes, la dictature, une des pires de la planète, demeure inflexible. Les changements apportés par le président Berdymoukhammedov sont cosmétiques, donnant à cette ex-république soviétique d´Asie centrale un air moins ubuesque que sous la férule de Saparmourad Niazov, mort en décembre 2006 après deux décennies de règne sans partage.
Mais le système bancaire, embryonnaire, pourrait connaître une petite révolution avec l´ouverture d´une banque de prêt. Dans une économie qui demeure publique aux trois quarts, peu nombreux sont les entrepreneurs… et encore moins ceux qui recourent au crédit. La Berd (Banque européenne de reconstruction et de développement) tente de faire passer la réforme. L´espoir est là, alors que la banque a pu mettre en œuvre neuf projets cette année, contre trois l´an passé et aucun entre 2005 et 2008.
Autre signe positif, la volonté de diversification. Fort de ses réserves de gaz, les quatrièmes du monde, le pouvoir tente de créer une industrie de transformation des matières premières. C´est vrai des produits hydrocarbures raffinés, du coton, avec l´inauguration récente de trois usines de textile, de l´alimentation, etc. « Souvent, le gouvernement veut signer clefs en main, avec une seule signature », explique Gautier Mangenot, chef du bureau de représentation au Turkménistan de Cifal, groupe français qui accompagne des entreprises pour leur installation ou leurs investissements en ex-URSS.
Récemment, le président Berdymoukhammedov accueillait son homologue ouzbek. Les deux hommes ont parlé d´ouvrir des corridors autoroutier et ferroviaire entre eux et avec l´Iran. C´est un nouveau signe de la restauration de bonnes relations avec les voisins du Turkménistan et d´enracinement dans l´environnement régional. Autant de chances pour les entreprises françaises de faire des affaires ? Oui, même si cela reste un casse-tête d´obtenir des permis de travail et que le pays manque de liquidités, du fait de l´effondrement de ses ventes de gaz à la Russie.
« Au cours des neuf premiers mois de 2010, les échanges commerciaux franco-turkmènes ont poursuivi leur lente dégradation tout en confirmant un solde très largement favorable à la France », selon une note du Conseiller économique et commercial. 112 millions d´euros d´échanges, principalement des ventes françaises liées à des contrats d´équipement. La France a sa carte à jouer grâce à la qualité de ses produits. « Les Turkmènes veulent ce qu´il y a de mieux », confirme M. Mangenot. La haute technologie est aussi la bienvenue, comme celle de Thales, qui a équipé plusieurs aéroports turkmènes de systèmes de contrôle aérien et discute actuellement la fourniture de celui servant à contrôler les gazoducs du pays.
Régis Genté, à Achkhabad
« Total et Bouygues sont des locomotives pour nous »
Mi-novembre 2010, lors du salon annuel du pétrole, une dizaine d´entreprises et PME françaises étaient présentes, emmenées par Ubifrance. L´espoir était notamment de voir les grandes sociétés françaises, comme Total, s´installer à Achkhabad. Le géant français va créer deux sociétés au Turkménistan, l´une seule et l´autre en joint-venture avec la SDCM, filiale de Bouygues. Total mise sur un duo avec le géant français du BTP qui, depuis 1993, a la confiance du chef de l´Etat turkmène et a réalisé entre 2 et 3 milliards d´euros de chiffre d´affaires. « Total et Bouygues sont potentiellement des locomotives pour nous. C´est la deuxième fois que nous venons. Nous allons à présent essayer d´être plus actifs, en organisant des journées techniques d´ici quelques mois », explique Gérard Momplot, directeur général du GEP (Groupement des entreprises parapétrolières).
R. G.