Le succès du volontariat international en entreprise ne se dément pas. Véritable atout pour les entreprises qui souhaitent se développer à l’international, il est aussi un tremplin pour les jeunes actifs.
Employer un jeune de moins de 28 ans à l’étranger pour une durée de 6 mois à 2 ans, c’est la formule gagnante du V.I.E. 16 800 jeunes étaient en mission au cours de l’année 2019. Pour les entreprises, face à un marché du travail tendu, trouver de jeunes talents devient même un sujet pour certains pays. Pour répondre à cette demande, Business France a structuré en 2019 l’organisation de « campus managers » pour sensibiliser les étudiants, qu’elle va renforcer cette année. Et a noué un accord avec l’association Nos quartiers ont des talents pour diversifier les profils de candidats. Pour autant, la concurrence pour décrocher une mission reste rude. 40 000 jeunes sont inscrits sur la plate-forme de mise en relation entre jeunes diplômés et entreprises Civiweb, alors que 2 000 offres de mission y figurent en permanence. Les profils recrutés sont d’ailleurs de plus en plus expérimentés. Diplômé(e) d’un bac+5, le ou la volontaire type a 25 ans, et compte par conséquent de 1 à 1,5 ans d’expérience depuis sa sortie des études, parfois davantage. « Les volontaires sont issus à parité d’écoles d’ingénieurs, d’école de commerce et de filières universitaires. La catégorie des ingénieurs est particulièrement demandée », observe Michel Bauza, directeur exécutif des V.I.E à Business France.
Éditeur de logiciel proposant des solutions de compression vidéo, de têtes de réseaux IPTV multiécran, de Cloud DVR et de CDN, Anevia recourt aux V.I.E pour trois types de missions : support (intervention auprès des clients opérateurs télécoms pour gérer le déploiement des produits), avant-vente (interface technique en amont de la vente) et commerciales. « Dans les deux premiers cas, nous recherchons des profils techniques, majoritairement des ingénieurs. Et même dans la partie commerciale, les doubles cursus sont appréciés car la connotation technique de la mission est importante et suppose un bagage technique », indique Stéphanie Pignal, DRH d’Anevia. Globalement, les missions proposées en V.I.E recouvrent un large spectre d’activité : prospection commerciale, animation de réseaux de distribution, accompagnement d’un contrat ou d’un chantier, ingénierie, le contrôle qualité…
Aujourd’hui, Business France souhaite démultiplier la sensibilisation des PME. « En décembre 2019, nous avons signé un accord avec la Région Auvergne Rhône-Alpes pour mettre en place le V.I.E à temps partagé », note Michel Bauza. Un dispositif que porte l’association IMED depuis 32 ans.
« Notre rôle est de déterminer les actions clés pour l’année à venir avec nos membres et de sélectionner les candidats qui vont ensuite remplir une mission pour deux ou trois PME dans une même zone. Avant leur départ, nous les formons pendant 4 mois aux techniques du commerce international, à la négociation, à la vente, aux relations interculturelles pour parfaire leurs connaissances… », détaille Loïc Bonnardel, délégué général de l’Imed. Une vingtaine de volontaires à temps partagé sont ainsi recrutés chaque année. « Historiquement, la région Sud a été la première à financer du V.I.E à temps partagé, depuis 2015 elle finance aussi des V.I.E à temps plein. Et nous travaillons désormais avec 6 autres régions en France sur le V.I.E à temps partagé », poursuit Loïc Bonnardel.
Pour les jeunes, le V.I.E se révèle une expérience souvent enrichissante. Diplômée de Burgundy School of business, Estelle Charid est en V.I.E depuis un an au Japon pour Nikon-Essilor, où elle occupe un poste d’assistante chef de projet marketing. « Je gère la vie du verre depuis sa conception jusqu’au packaging du produit et assure le déploiement du produit sur l’Asie, l’Europe et le Canada », témoigne la jeune femme. Pour remplir des missions souvent à responsabilités, les recruteurs ciblent des candidats matures faisant montre d’autonomie, de rigueur et de dynamisme.
La réussite de la mission suppose également un suivi de la part de l’entreprise. « Avant de partir, les volontaires passent au moins 3 mois au siège pour connaître nos produits, les équipes et créer des liens. Ensuite les managers sont très présents, même si c’est à distance, se déplacent dans le pays et les jeunes viennent régulièrement pour faire des points », assure Stéphanie Pignal. Anevia propose quasi systématiquement un contrat aux V.I.E en fin de mission et 75 % d’entre sont recrutés. Globalement, 70 % des jeunes se voient proposer une embauche définitive à l’issue de leur mission et 51 % d’entre eux se font embaucher par l’entreprise dans laquelle ils ont assuré la mission.
Témoignage
Une start-up dans l’aventure V.I.E
Lauréate du Grand Prix V.I.E 2019 dans la catégorie start-up, Toucan Toco – qui propose des solutions de reporting et de data visualisation – compte une dizaine de collaborateurs à l’étranger dont 3 V.I.E aux États-Unis et aux Pays-Bas. La société de 80 personnes, est en plein développement et recourt à ces contrats pour renforcer ses actions commerciales dans ces deux marchés cibles. Support administratif extrêmement simple et accès à un vivier de candidats compétents constituent pour ses dirigeants les atouts du dispositif. « Les V.I.E sont positionnés sur deux types de postes : commerciaux sédentaires juniors, chargés de qualifier les appels reçus et d’identifier les prospects, et commerciaux de terrain, plus capés. Idéalement, nous cherchons à envoyer un binôme », détaille Kilian Bazin, cofondateur de Toucan Toco. Tiphaine Le Roux et Florian Neugue, sont justement en mission dans la région de Boston. Après un bachelor suivi aux États-Unis et un master obtenu à l’école américaine de Paris, le second recherche des prospects, tandis que la première s’occupe de la partie négociation. Diplômée de l’ESSCA en 2016, Tiphaine le Roux a d’abord intégré Adobe au Royaume-Uni puis en France avant de rejoindre Toucan Toco en mars 2019. « Je m’étais intéressée au V.I.E à la sortie de mes études, mais mes démarches n’avaient alors pas abouti car il y a beaucoup de concurrence. Avec cette mission aux États-Unis, je m’investis dans une aventure dans laquelle ma contribution compte », détaille la jeune femme.
Témoignage
Victor Beuzelin, Export & Business Developer chez Starting France en Allemagne
Particulièrement chanceux, Victor Beuzelin s’est vu proposer une mission… sans avoir entamé aucune démarche. « C’est une chargée de recrutement de Business France qui m’a contacté via LinkedIn pour un poste commercial en Allemagne », raconte le jeune homme. Son parcours a en effet intéressé StartingFrance, une société qui propose des ingénieurs commerciaux aux entreprises françaises et allemandes souhaitant se développer outre-Rhin. Victor Beuzelin a intégré l’ESCE après son bac, multipliant les expériences à l’étranger : 6 mois d’échange universitaire à Berlin, 6 autres au Québec, un stage de 7 mois à Londres chez Adobe… « En cinquième année, je me suis spécialisé en export management, un tout nouveau master de l’école », poursuit-il. Depuis septembre 2018, Victor Beuzelin a pour mission de démarcher des entreprises allemandes et françaises de la high-tech pour les convaincre du potentiel de développement outre-Rhin et devenir leur représentant commercial. « Le V.I.E m’a donné l’opportunité d’assurer des fonctions à responsabilités, avec une large autonomie », se félicite-t-il. Alors que sa mission prendra fin en août, il souhaite rentrer en France mais réfléchit avec l’entreprise à la possibilité d’opérer depuis la France avec un focus sur l’accompagnement des clients allemands souhaitant s’y développer.