Au cours du traditionnel cocktail de vœux de la Chambre de commerce du Brésil en France (CCBF), organisé le 23 janvier à l’Ambassade du Brésil à Paris, son président, Philippe Lecourtier, a annoncé une accélération de l’activité de cet organisme et une nouvelle stratégie de communication avec, notamment, un nouveau site actuellement en préparation. L’affluence au cocktail a montré que l’intérêt des entreprises françaises et brésiliennes pour développer les relations d’affaires demeure intact.
Le nouvel ambassadeur du Brésil en France, Luís Fernando Serra, un diplomate de carrière, présent pour la 1ère fois à cette manifestation, a salué la forte présence des entreprises françaises au Brésil (4ème investisseur étranger avec un millier de filiales employant plus de 500 000 salariés) et a déploré la régression de la relation commerciale.
Le montant des échanges bilatéraux (exportations+importations) a atteint 6 milliards de dollars en 2019, contre 10 milliards en 2012. « La coopération bilatérale n’est pas au niveau qu’on souhaiterait, notamment en matière d’échanges commerciaux » a indiqué de son côté Philippe Lecourtier.
L’année 2020 pourrait cependant marquer une inflexion.
Un contexte économique plus favorable
D’abord parce que la situation macro-économique et financière est favorable. Le Brésil semble enfin sortir de la longue crise dans laquelle il a été englué depuis plusieurs années. Plusieurs réformes structurelles ont été engagées (retraites, privatisations, dérégulation, etc.).
« Il y a une amélioration des grands indicateurs économiques » a souligné Luís Fernando Serra, évoquant le niveau historiquement bas du taux de référence de la Banque centrale du Brésil à 4,25 %, la faiblesse de l’inflation (4,3 % en 2019), le niveau élevé de l’excédent de la balance commerciale (46,6 milliards de dollars en 2019, dont 27,6 milliards avec la Chine) et le niveau élevé des réserves de change (357 milliards de dollars en janvier 2020).
Le Brésil devrait connaitre une accélération de sa croissance en 2020 (+2,4 % contre 1,2 % en 2019), un phénomène rare en Amérique latine.
Nouvelle vague d’investissements
Ce contexte nouveau ouvre des perspectives intéressantes pour les entreprises françaises.
« Il y a une nouvelle vague d’investissements en cours dans les infrastructures, principalement avec la participation du secteur privé sous la forme de concessions, de PPP et de privatisations. Des opportunités d’affaires devraient se dégager dans une large gamme de secteurs : l’eau et l’assainissement (privatisation de différentes sociétés publiques de gestion d´eau, dont la CEDAE de l’état de Rio de Janeiro), l´énergie (privatisation d´Eletrobras entre autres), les aéroports, les autoroutes, les chemins de fer et les ports notamment » affirme Frédéric Donier, directeur du cabinet de conseil Crescendo, basé à São Paulo.
Ce dernier estime que « 2020 va être une bonne année pour les entreprises françaises qui ont appris à être résilientes et persistantes au Brésil ».
De fait, le groupe Engie offre un bon exemple des possibilités offertes par le Brésil. Après avoir acquis en 2019 le réseau de transport de gaz TAG (4500 km de gazoducs, soit 47 % de l’ensemble des infrastructures gazières du pays), Engie a remporté en janvier 2020 l’appel d’offres pour la construction, l’exploitation et la maintenance d’une ligne de transport d’électricité de 1 800 km, d’une nouvelle sous-station et l’extension de 3 autres sous-stations dans le nord du Brésil. L’investissement est évalué à 750 millions d’euros.
Une relation bilatérale qui passe par les collectivités territoriales
Certes, les relations officielles franco-brésiliennes traversent un moment compliqué depuis la polémique sur les incendies en Amazonie et le rendez-vous du président Jair Bolsonaro chez son coiffeur, dûment médiatisé via les réseaux sociaux, alors qu’il devait au même moment recevoir Jean-Yves Le Drian lors de sa visite au Brésil en juillet 2019.
Mais la coopération bilatérale tend à se développer au niveau des collectivités territoriales.
Lors de sa visite au Brésil, Jean-Yves Le Drian a ainsi signé une feuille de route avec les gouverneurs des neuf États du Consortium pour le développement durable du Nord-Est en vue de réaliser des projets liant objectifs de développement durable et fourniture de services publics de qualité. Cette vaste région du Brésil, peuplée de plus de 57 millions d’habitants, a une superficie qui équivaut à trois fois celle de la France. L’Agence française de développement (AFD) y est très active.
En novembre 2019, les gouverneurs se sont rendus en France, dans le cadre d’une tournée européenne, et ont présenté les projets d’infrastructures et de développement lors d’une réunion avec des chefs d’entreprise français. Ils ont également fait le point avec Jean-Yves Le Drian sur l’état d’avancement de la feuille de route.
La France déterminée à « coopérer avec tous les Brésils »
A l’occasion de sa visite au Brésil, le ministre français a rencontré également le gouverneur de l’état de São Paulo, João Doria, très impliqué dans la lutte contre le réchauffement climatique.
Les discussions ont porté sur « les questions d’environnement mais aussi sur les questions liées finalement à la ville durable et tout ce qui articule la transition écologique avec la transition économique » selon le ministre. Un programme de travail « ambitieux » a été élaboré.
Autre exemple, la DG Trésor a accordé récemment un financement en provenance du FASEP à hauteur de 800 000 euros pour financer l’étude technico-économique d’un projet de tramway dans la ville de Niterói, située en face de Rio de Janeiro.
Du côté officiel français, le message est clair : « la France est déterminée à coopérer avec tous les Brésils ». Dernier élément positif, et non des moindres, le Forum économique France-Brésil, qui se tient chaque année alternativement au Brésil et en France, est prévu en novembre prochain au Brésil.
Daniel Solano