« L’un avait besoin de palettes, l’autre savait les fabriquer. C’est parti comme ça. » Lamia Laguab, directrice générale de Lapal Pro, un fabricant de palettes en bois installé dans la banlieue d’Alger, non loin de l‘aéroport, résume ainsi l’origine de cette PMI algéro-française à 50-50, créée en 2003.
L’actionnaire français est un industriel du sud de la France, Jean-Jacques Daniel, patron de SMC, un spécialiste de l’emballage. L’actionnaire algérien est Slim Othmani, un des entrepreneurs connus d’Algérie. Depuis, l’actionnariat s’est diversifié, mais les deux co-fondateurs sont restés les principaux. Les débuts ont été timides : « Il a fallu s’adapter au marché algérien. Les entreprises n’avaient pas l’usage des palettes, elles étaient habituées à utiliser de l’emballage de récupération, se souvient Lamia Laguab. Puis, les grandes entreprises privées de l’agroalimentaire ont commencé à investir dans de nouvelles lignes de production, de nouvelles machines. Elles ne pouvaient plus se permettre d’utiliser des produits non standardisés. Elles ont dû se mettre à niveau. »
« Tous les responsables de production ont été envoyés chez SMC pour être formés, tant le métier de la palette était inconnu ici », dit cette dynamique jeune femme. Elle aussi est relativement neuve dans son métier de manager, qu’elle exerce depuis 2007 : architecte de formation, elle avait commencé à y travailler pour dessiner des palettes en 3D.
Aujourd’hui, la PMI, qui travaille aux standards européens, emploie 30 personnes et réalise entre 150 et 200 millions de dinars (1,5 à 2 millions d’euros) de chiffre d’affaires. Son avenir pourrait être radieux – ils ne sont que trois à quatre fabricants sur le marché. Mais son développement est freiné par les restrictions aux importations instaurées en 2009, notamment l’obligation de payer par crédit documentaire, sans distinction entre les matières premières destinées à la transformation et les produits finis destinés à la revente en l’état. « Depuis deux ans, nous vivons une vraie galère », soupire Lamia Laguab. Lapal Pro doit importer tout son bois car les ressources forestières sont rares et mal exploitées en Algérie. L’obligation de payer par lettre de crédit a instauré un vrai parcours du combattant pour récupérer les documents entre le fournisseur (certificats d’origine et de conformité…), les administrations (notamment la franchise de TVA auprès du ministère du Commerce), les banques (récupérer la lettre de crédit…). « Avant, nous traitions directement avec nos fournisseurs et nous étions livrés en trois semaines. Aujourd’hui, une livraison peut prendre trois à quatre mois », raconte Lamia Laguab. Avec de nombreuses autres PMI algériennes, Labal Pro espère que les promesses d’assouplissements faites par le gouvernement récemment se concrétiseront bientôt…
Christine Gilguy