Toute victoire se doit d’être confirmée. Paris, qui doit accueillir l’Agence bancaire européenne (European Banking Authority, EBA), devra donc confirmer. En effet, si après le « leave » britannique, le siège de l’établissement européen lui a été attribué, il faut faire vite, le Royaume-Uni devant quitter l’Union européenne (UE) officiellement le 29 mars 2019.
Le dossier est aujourd’hui entre les mains de Choose Paris Région, guichet unique «spécial Brexit» de Paris Région Entreprises, l’agence de développement économique de la Région Ile-de-France. L’affaire n’est pas mince. Ce sont d’abord 200 salariés à déménager du siège actuel à Londres, et 400 personnes au total environ si l’on compte les familles. Ce sont aussi 4 500 mètres carrés (m2) de locaux à trouver au centre de Paris ou à La Défense.
Enfin, il faut obtenir les autorisations formelles du Conseil européen et de la Commission européenne, ce qui ne pose a priori pas de problème, mais aussi du Parlement européen, autorité budgétaire dans ce dossier. La France et Paris ont pris des engagements financiers pour l’emporter sur les pays et les villes concurrentes de l’UE.
P. O’Quinn : « les services de l’État sont engagés »
Le diable est dans les détails, dit-on couramment, et il convient de se rappeler que si Paris l’a emporté sur Dublin pour abriter l’EBA, ce n’est qu’au tirage au sort, de même que l’Agence européenne du médicament (EMA) n’a été dévolue à Amsterdam aux dépens de Milan qu’au terme d’une telle procédure aléatoire. Or, il se murmure que la métropole du nord de l’Italie serait prête à contester la décision d’attribution de l’EMA au motif que la capitale néerlandaise aurait du mal à remplir ses engagements.
Les acteurs franciliens se doivent donc d’être très attentifs. Et on comprend que, compte tenu de l’enjeu, l’État soit à l’écoute. « C’est un dossier symbolique dans le cadre du Brexit, et, bien sûr, les services de l’État sont engagés », confirmait Philippe O’Quinn chargé de mission à Bercy, lors de la visite, le 22 février, de Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie et des finances, dans les locaux de Choose Paris Région.
Par chance, contrairement à ce que l’on pourrait penser a priori, « tout l’effectif de l’EBA n’est pas britannique ou anglophone », souligne Robin Rivaton, directeur général de PRE et responsable du guichet unique. Il s’agit d’une organisation européenne et, au total, il y a plus de représentants d’autres nations : Français, Allemands, Italiens, Espagnols, etc. Ce qui facilite, en fait, le travail d’accompagnement de Choose Paris Région.
En effet, parmi les volets de son action (logement…), figure la recherche d’établissements d’enseignement adaptés, bilingues si nécessaires, français-anglais entre autres, mais pas uniquement. Pour un nombre important d’élèves, le guichet unique peut plus facilement répondre à une demande diversifiée de classes en langues étrangères qu’à une demande exclusivement en anglais.
Offrir un service personnalisé
Il ne faudrait surtout pas oublier la dimension psychologique du dossier. « Le Brexit est subi par le personnel de l’EBA et donc un accompagnement soigné est essentiel », explique-t-on au guichet unique. C’est pourquoi Choose Paris Région ne se contente pas d’orienter vers la plateforme « Welcome to France » de Business France, dont le service « Helping you to settle in », en français et en anglais, vise à informer et orienter les talents internationaux et leur famille dans leurs principales démarches d’expatriation en France.
Choose Paris Région a ainsi organisé, le 19 mars dans les locaux de l’EBA à Londres, un atelier d’information sur ses services d’accompagnement et sur l’offre francilienne en matière d’éducation et de logement. Certaines présentations ont, au demeurant, confiées à des experts extérieurs, par exemple des spécialistes du volet logement.
Ensuite, il est prévu un accompagnement plus individualisé, sur la base de réponses à un questionnaire d’identification des besoins. Les Français de Choose Paris Région prévoient ainsi de retourner au siège de l’EBA en juin « pour rencontrer les salariés et établir une relation de confiance ». Rendez-vous est pris.
François Pargny
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