C’est une première au Sénégal pour la banque publique Bpifrance : elle vient d’y signer ses deux premiers crédits acheteur de petits montants, à l’occasion du dernier séminaire franco-sénégalais à Paris*. Outre un crédit export de 15 millions d’euros accordé au Centre national de calcul scientifique de Diamniado pour acquérir un supercalculateur qui sera construit par Atos, Bpifrance a aussi signé son premier crédit acheteur dans le cadre d’un grand projet d’infrastructure, celui du Train express régional (TER) de Dakar. Son premier du genre, qui pourrait démontrer sa complémentarité vis-à-vis des grands financiers du développement.
Pour ce dernier projet, il s’agit d’un prêt de 15 millions d’euros, garanti par Bpifrance assurance export, filiale de la banque publique dédiée à la gestion des garanties export de l’État français, accordé au Sénégal pour financer le contrat d’assistance à maîtrise d’ouvrage par le bureau d’étude et d’ingénierie français Systra (filiale de SNCF et RATP). Le prêt a été signé par Pedro Novo, directeur des Financements export de Bpifrance, et le ministre des Finances du Sénégal Amadou Ba, le 19 octobre, mais il n’a pas été mentionné dans le communiqué de presse officiel de Matignon. C’est un tweet de Nicolas Dufourcq, directeur général de Bpifrance, qui en a révélé l’existence.
Compléter le financement de ce grand projet sur un « petit ticket »
Pourquoi ce crédit acheteur ? « Il s’agit de compléter le financement de ce grand projet, commente Pedro Novo, directeur des Financements export de Bpifrance. Nous, nous avons apporté une solution sur une toute petit partie de ce projet, sur laquelle les banques commerciales ne se sentaient pas à l’aise ».
Un crédit acheteur d’un tel montant est en effet un « petit ticket », trop petit pour vraiment intéresser les banques commerciales alors que les banques de développement ne financent pas ce type de montage. « Nous nous positionnons dans une complémentarité avec les banques de développement, et dans une coopération public/privé », souligne encore Pedro Novo, qui insiste aussi sur la rapidité de décision et la flexibilité dont peut faire preuve Bpifrance dans ce domaine.
Rappelons que le projet de TER de Dakar, qui doit relier dans un premier temps le centre de la capitale sénégalaise à la ville nouvelle de Diamniado puis, à terme, au nouvel aéroport Blaise-Diagne, est un important investissement pour l’État sénégalais, qui dépasse les 700 millions d’euros. Il a reçu les soutiens financiers de banques de développement (Banque africaine de développement, Banque islamique de développement…) et de la France. Le chantier de conception et de construction, qui a été divisé en trois lots, est réalisé par trois consortium internationaux, dont les chefs de file sont des entreprises françaises, parmi lesquelles Eiffage, Engie Ineo, Thales, NGE, TSO et CIM. La France finance, à hauteur de 195 millions d’euros (DG Trésor, AFD), l’acquisition du matériel roulant.
Un modèle pour de futures opérations dans le cadre de grands projets
Pour Pedro Novo, cette opération sur le TER de Dakar pourrait servir de modèle pour de futures interventions dans le cadre de grands projets d’infrastructures : « En termes de financement, que vous soyez un grand groupe ou une PME, c’est la démonstration que nous pouvons apporter une solution pour les petits montants », estime-t-il.
D’autant plus qu’après deux ans d’activité en crédit export et toute une série de contrats signés en Afrique -dont deux cet été en Côte d’Ivoire- la banque publique française, au début regardée avec méfiance par certains acteurs, commence à être mieux comprise par « le marché » (banques de développement, banques commerciales) mais aussi par les autorités publiques en France et en Afrique. « Nous avons acquis une forme de maturité, estime Pedro Novo. Avec notre biculture publique et privée, nous essayons de faire le lien entre le public et le privé alors qu’auparavant, ce lien n’était assuré que par les garanties d’État ».
Depuis le début de l’année, Bpifrance a signé au total une vingtaine de crédits export, toutes zones géographiques confondues. Elle devrait présenter un bilan de cette activité en début d’année prochaine.
Christine Gilguy
*France / Sénégal : Atos va livrer le premier supercalculateur africain
Pour prolonger :
–Financements export : Bpifrance signe son premier crédit export pour un contrat au Mozambique
–Financements export : Bpifrance s’incruste dans le paysage du crédit export
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