Par Pierre Charmillon
Cette étape traite des points à vérifier pour éviter les déconvenues possibles lorsque l’on cherche à « sourcer » un produit à l’étranger.
À ce propos, citons deux exemples vécus.
Exemple 1
Déroute pour un objet publicitaire
Cette société spécialisée dans le whisky faisait fabriquer un objet publicitaire type PLV (publicité sur le lieu de vente) en matière plastique d’environ 40 cm et représentant un personnage symbolisant cette marque célèbre de whisky. Ce personnage était réalisé par la méthode du rotomoulage qui consiste à produire une pièce creuse et d’un seul tenant. Une fois réalisé, le chapeau était peint en noir, la redingote en rouge, le pantalon en blanc et le reste en couleur chair.
Pour des raisons de coût, la société décida de quitter son fournisseur français, qui lui donnait, par ailleurs, à l’exception du prix, toute satisfaction quant à la qualité, aux délais de livraison, etc.
Leur recherche d’un nouveau fournisseur l’amena à trouver une source alternative en Asie. L’échantillon envoyé pour valider le produit étant conforme à ses exigences, une commande couvrant les besoins d’une année fut passée avec un paiement avant expédition. À la réception des conteneurs en Europe, les figurines furent inspectées. Et à ce moment la société s’aperçut que le personnage avait été réalisé en plusieurs morceaux, à savoir les jambes, les bras, la tête et le corps séparément. Les différents éléments étaient collés les uns aux autres et du mastic masquait les différences d’épaisseur entre les parties du corps. Le tout était recouvert de peinture qui masquait les jointures.
Où est le problème, me direz-vous ? Apparemment, il n’y en avait pas, si ce n’est qu’en prenant le personnage par un bras, celui-ci vous restait dans la main, le reste se séparant en plusieurs morceaux…
Résultat : les conteneurs furent mis au rebut et la société de whisky dut se réapprovisionner auprès de son fournisseur français habituel. Il est à noter que les conteneurs mis au rebut constituaient une perte sèche pour la société étant donné le paiement effectué à la commande.
Exemple 2
Quand ça ne colle pas
Autre exemple dans un métier un peu plus technique, mais assez révélateur des précautions à prendre lors d’une telle opération d’importation.
L’entreprise X avait démarché au Maroc un fabricant de rubans adhésifs, par ailleurs le plus important au Maghreb, dans le but de lui vendre des matières premières entrant dans la composition des adhésifs et leur conférant leur pouvoir collant. Par l’intermédiaire d’une société de trading anglaise, X avait trouvé un fournisseur asiatique. Ce fournisseur était par ailleurs audité régulièrement par le personnel de la société anglaise, qui avait toutes les compétences techniques pour mener à bien cette tâche.
Comme il est d’usage de le faire dans ce cas, une tonne d’essai avec un bulletin d’analyse conforme avait été expédiée par notre fournisseur asiatique et réceptionnée par notre client marocain. Les tests que ce dernier effectua à réception révélèrent le produit comme correspondant à l’utilisation.
Suite à cet essai positif, le client marocain passa commande de deux conteneurs de 20 pieds avec 18 t de marchandises chacun.
Le premier conteneur fut testé à son arrivée à Casablanca. Résultat : les premières productions de rubans adhésifs avec cette livraison montraient un pouvoir collant inférieur aux standards exigés et ce malgré un bulletin d’analyse conforme !
Se posa alors le problème de l’utilisation de ce premier conteneur ainsi que du second puisque celui-ci devait arriver la semaine suivante à Casablanca et que la qualité des marchandises était identique à la première livraison car provenant de la même fabrication. Malheureusement, il était impossible de revendre le produit au Maroc ou en Europe car il s’agissait du cas de figure « produit unique/client unique ».
Un retour à l’usine de départ était par ailleurs trop problématique.
Finalement, après un déplacement sur site des techniciens anglais, le client marocain décida d’accepter la totalité de la marchandise moyennant un rabais important et prit l’option de recycler le produit défectueux à petites doses pour des fabrications requérant un pouvoir collant moins important.
Les conséquences de cette malheureuse affaire furent multiples : financièrement la perte fut conséquente pour le trader anglais. En ce qui concerne la société X, au-delà de la perte d’image vis-à-vis du client, la perte potentielle de commission se chiffra à plusieurs dizaines de milliers d’euros. Et le client fut perdu définitivement pour les deux sociétés.
Quels enseignements peut-on retirer de ces deux exemples pour des opérations d’importations de pays « lointains » ?
– Première constatation : malgré les échantillonnages conformes aux spécifications, les livraisons peuvent être non conformes. Comment remédier à cela ? Nous le verrons en détail plus loin, mais nous pouvons déjà mentionner la nécessité non seulement d’établir un cahier des charges strict et adapté à son métier, mais aussi ne pas faire l’économie de vérifications en usine, à l’expédition et au chargement.
– Deuxième constatation : en cas de non-conformité, se pose la nécessité de trouver des solutions alternatives possibles. Évidemment, ces solutions sont génératrices de pertes financières et les conditions de paiement (voir Étape 4) constitueront un élément important dans votre négociation.
C’est pourquoi nous devons nous intéresser à ce qu’il faut mettre en place pour éviter de tels désagréments. Tout d’abord, vous devrez concevoir et rédiger un cahier des charges.
Plaçons-nous dans le cas d’une importation d’un produit technique d’un fournisseur que vous avez trouvé seul ou via des intermédiaires (voir Étape 2).
Votre service qualité ou les personnes en charge de celui-ci doivent travailler sur un cahier des charges, c’est-à-dire sur la définition de ce qui est nécessaire et indispensable pour le produit que vous allez faire fabriquer et/ou importer pour, ensuite, le commercialiser sur vos marchés.
Ce cahier des charges peut comprendre, entre autres spécifications :
– l’emballage extérieur avec les marquages/références que vous souhaitez ;
– le type de conditionnement de commercialisation ;
– le marquage précis ;
– la notice d’utilisation dans la langue du pays ;
– les couleurs ;
– les normes et réglementations à satisfaire ;
– et bien sûr tous les éléments relatifs à la qualité intrinsèque du produit.
Comment rédiger un tel cahier des charges ? Vous en avez certainement déjà eu en main de la part d’un de vos clients et vous pourrez vous en inspirer. Voir le modèle en PDF de cahier des charges en bas de page
Le conseil de Pierre
N’oubliez surtout pas d’exiger dans votre cahier des charges la preuve (bulletins d’analyse par exemple) que les produits ont bien passé les tests exigés dans des laboratoires que vous aurez agréés chez votre fournisseur ou à l’extérieur.