1.1 Les grands principes
Les trois grands principes de l’assurance-crédit sont : la prévention, le recouvrement et l’indemnisation. On les retrouve chez tous les assureurs, quel que soit le pays dans lequel réside l’exportateur. En voici les principales caractéristiques :
– garantie du risque commercial et/ou politique. Pour le risque politique, notons que certains assureurs couvrent plus de pays que d’autres, en clair, prennent plus de risques. Nous pensons à certains assureurs belges et chinois ;
– montants des crédits à couvrir sur tel ou tel client soumis à l’agrément de l’assureur (sauf pour les non-dénommés). Après étude de la solvabilité de l’acheteur et l’analyse des risques pays, l’arbitre va définir une limite de crédit qui constitue la base sur laquelle une indemnisation, en cas de sinistre, pourra être versée à l’assuré, sous certaines conditions à respecter, bien évidemment ;
– indemnisation partielle des pertes : s’applique le principe de la « quotité garantie », qui va de 50 à 95 % du montant de la facture ;
– en principe, garantie des pertes résultant de l’insolvabilité juridique ou présumée du client mais plusieurs assureurs dans des polices spécifiques destinées aux PME, couvrent également les impayés, quelle que soit la situation juridique du débiteur.
Attention ! Contrairement à certaines idées reçues, l’assurance-crédit ne protège pas contre le risque de retard de paiement ! Combien de fois avons-nous entendu des commerciaux, interrogés sur des retards élevés de paiement, nous répondre sans scrupule : « Pas grave, nous sommes assurés crédit » !
De fait, sur la partie recouvrement du paiement, l’assuré dispose d’un délai, variable selon les compagnies d’assurance-crédit, pour déclarer à cette dernière sa créance impayée. La plupart des assureurs interviennent également en recouvrement sur les créances détenues par l’assuré sur des acheteurs non garantis et également pour des créanciers non assurés…
L’échec de l’action de recouvrement ou son impossibilité à pouvoir être mise en œuvre, notamment en cas d’insolvabilité de l’acheteur, va déclencher le processus d’indemnisation.
Celle-ci intervient à l’issue d’un délai de carence variant généralement de 3 à 6 mois après la déclaration de la créance impayée auprès de l’assureur.
La créance impayée du fait de la carence de l’acheteur (insolvabilité présumée) ou de son insolvabilité constatée est indemnisée sur la base de l’encours garanti au jour de la déclaration de sinistre et en fonction de la quotité garantie dans le cadre du contrat souscrit.
1.2 Les différentes polices
– La plus courante
La principale police proposée sur le marché est la police globale (son nom diffère selon les assureurs-crédits, mais les principes sont les mêmes).
Dans le cadre d’une police globale, l’ensemble du portefeuille clients export est couvert par le contrat qui prend en charge alors le risque commercial et le risque politique sur acheteurs privés et publics.
Seuls sont généralement exclus les petits sinistres dont le montant unitaire ne dépasse pas quelques centaines d’euros.
Au-delà d’un seuil d’encours appelé généralement « non dénommé » (par exemple, 10 000 euros : les montants en dessous de ce seuil sont systématiquement couverts), les acheteurs font l’objet d’un arbitrage individuel, opération par opération, par l’assureur. Cet arbitrage conduira à la couverture totale ou partielle de l’encours demandé. L’assureur peut également refuser de couvrir un acheteur sur lequel il estime que la probabilité de défaillance est forte. L’exportateur doit alors mettre en place d’autres solutions s’il tient à faire cette affaire tout en se préservant du risque de non-paiement. Une évolution importante de ces dix dernières années : la plupart des compagnies offrent des services en ligne, sur Internet, ce qui a permis de réduire les délais de réponses.
– Autres polices
La plupart des assureurs ont élaboré des polices plus particulièrement adaptées à la problématique des PME (en général entre 4 et 5 millions d’euros de chiffre d’affaires) et également des TPE (entre 1 et 1,5 million d’euros de chiffre d’affaires).
Il existe également des polices plus spécifiquement destinées aux grandes entreprises et des polices groupe (ou polices corporate) permettant de sécuriser non seulement les créances de la maison mère, mais aussi celles des filiales.
Dans ce dernier cas, dans le cadre d’une procédure de credit management groupe, centralisée ou décentralisée, le responsable crédit peut optimiser la gestion du poste client au niveau mondial.
– Les polices « excess » ou « en excédent de perte »
Elles portent parfois d’autres noms, selon l’assureur : « risque excédentaire » ou « catastrophe ». Quelle que soit l’appellation, elles ont pour principe de ne couvrir que les risques hors normes de « sinistres catastrophiques », dont l’ampleur exceptionnelle pourrait mettre en danger l’équilibre d’une entreprise.
Une limite de ce produit en principe très séduisant : dans la mesure où il laisse une très grande autonomie au credit manager (compte tenu du principe d’auto-arbitrage), on se doute qu’il est réservé et proposé uniquement aux entreprises exportatrices disposant d’un vrai service interne structuré de gestion du crédit client. Cela signifie qu’il ne suffit pas d’avoir une procédure rigoureuse de credit management. Il faut aussi, et surtout, qu’elle soit respectée.
Attention ! Les polices en excédent de pertes ne couvrent que les risques commerciaux sur des acheteurs privés ; ils ne couvrent ni les risques politiques ni les risques sur des acheteurs publics.
Contrairement aux polices globales, basées sur un volume de ventes et une prime exprimée en pourcentage de chiffre d’affaires assurable, l’assureur-crédit intervenant en excédent de pertes va baser son calcul de prime forfaitaire en fonction du seuil de sinistres à partir duquel il est susceptible d’intervenir.
L’indemnisation d’un sinistre ne porte que sur l’insolvabilité juridiquement constatée et n’intervient qu’après dépassement d’un seuil de cumul de sinistres que l’assuré s’est engagé à conserver à sa charge.
En général, il n’y a pas de délai de carence pour
l’indemnisation d’un sinistre.
Repère
On peut télécharger une excellente présentation en anglais d’une étude comparative entre police globale et police excess, sur les sites Internet suivants :
– Coface Luxembourg,
www.coface.lu/CofacePortal/LU/fr_FR/pages/home/wwd/assurc/assurce
– Coface Belgique,
www.coface.be/CofacePortal/BE/en_EN/pages/home/wwd/ci/assurce
1.3 L’offre d’assurance-crédit
Le marché mondial est dominé par trois grands acteurs européens (CA 2010) :
– Euler Hermes : 2 148 millions d’euros (filiale française Euler hermes Sfac) ;
– Coface : 1 622 millions ;
– Atradius (filale française, Atradius France) : 1 450 millions.
Mais il existe de nombreux challengers qui peuvent proposer des solutions adéquates aux exportateurs français, grâce à leurs points forts (sur certaines zones, notamment) : citons plus particulièrement le belge Ducroire, l’italien Sace, l’espagnol Cesce, le chinois Sinosure, le britannique ECGD, le canadien EDC, Exim Bank aux États-Unis…
Dans le cadre d’un credit management décentralisé, plutôt que de souscrire une police globale, il peut s’avérer plus judicieux de souscrire une assurance-crédit locale. Notons qu’il existe deux sites permettant d’accéder aux coordonnées des principaux assureurs crédit dans le monde :
– Site de l’Union de Berne :
www.berneunion.org.uk/bu_profiles.htm
– Site de l’ICISA, The International Credit Insurance & Surety Association :
www.icisa.org/icisa-member-search/1914/
Le conseil de Jean-Claude
Les bonnes questions à se poser pour préparer sa démarche auprès d’un assureur-crédit :
– Quels sont les principaux pays concernés (exposition au seul risque commercial et/ou au risque politique) ?
– L’approche risques pays est-elle bien maîtrisée lors de l’établissement des offres ?
– Les acheteurs sont-ils principalement de droit privé ou public selon les zones d’exportation ?
– Quel pourcentage du portefeuille clients doit être assuré : globalité, partiellement, selon les zones géographiques ou encore, seuls les principaux clients ?
– Quel sera le coût global du contrat (prime et frais d’enquête et de surveillance) ? À comparer avec le coût des crédits documentaires et/ou des lettres de crédit standby, en tenant compte pour l’assurance-crédit des frais financiers liés aux délais d’indemnisation, lesquels bien évidemment n’existent pas dans les techniques documentaires.
– Le délai de déclaration des impayés n’est-il pas trop contraignant et est-il compatible avec l’organisation et les procédures internes de l’entreprise, plus particulièrement la politique commerciale de l’entreprise ?