Quelque 320 entreprises françaises et 200 sociétés iraniennes se sont pressées le 28 janvier au siège parisien du Medef, qui recevait Hassan Rohani au deuxième jour de sa visite officielle en France (27-28 janvier) et le Premier ministre français Manuel Valls. « La présence exceptionnelle » du président de la République islamique au Medef, comme l’a souligné son président Pierre Gattaz, a permis de se faire une idée plus précise de la façon dont Paris et Téhéran envisageaient leur nouvelle relation politique et économique, après dix années de brouille et de sanctions sur fond de dossier nucléaire.
Le chef du gouvernement français, qui s’exprimait le premier, et le chef de l’État iranien ont tous deux évoqué les liens traditionnels et très anciens liant leurs deux pays, ce qui pouvait apparaître dans l’assistance comme le préalable indispensable à une renaissance des relations bilatérales. « La France et l’Iran se retrouvent, et je dis bien se retrouvent… deux vieilles nations qui se sont si bien connues », a ainsi souligné Manuel Valls, tandis qu’Hassan Rohani a invité à oublier « les rancœurs », à « tourner la page », assurant au passage que « la volonté politique est le socle d’un partenariat qui existe déjà » entre les deux pays.
Alors que le Premier ministre a plaidé pour un « partenariat ambitieux », le président iranien a salué à plusieurs reprises la France, qualifiée ainsi de « puissance » : puissance « économique », «culturelle », « scientifique », « politique », faisant également allusion à la diplomatie de Paris et son rôle important dans l’accord du 14 juillet dernier sur le démantèlement nucléaire dans son pays.
Signature de quatre accords de coopération, dont PSA-Iran Khodro
Le message aux représentants des grandes entreprises françaises était donc très politique, mais s’ils n’ont pas évoqué le contrat Airbus annoncé par le ministre des Transports iranien, les deux hommes n’ont pas manqué d’évoquer les affaires.
« Nous avons besoin d’investissements dans l’énergie, l’agriculture, les transports, la reconstruction et la construction aéronautique, les chemins de fer, les routes… », a détaillé le chef d’État iranien, après avoir mis en avant « la position stratégique » de l’Iran dans la région, notamment vis-à-vis de l’Asie, et ses ressources énergétiques, son rôle en matière de sécurité et « l’expertise » de sa population. Auparavant, Manuel Valls avait souhaité que soient noués « des partenariats universitaires », débouchant sur « des campus conjoints » et « des formations communes ».
A l’occasion de cette rencontre au Medef, quatre accords de coopération ont été signés :
1 / entre Fives et Imidro (Organisation iranienne des Mines et des industries du développement minier et de la rénovation), holding minière du ministère du Commerce, de l’industrie et des mines, pour le développement d’une filière aluminium,
2 / entre l’IFP Energies nouvelles et le groupe Idro en matière de développement durable et plus particulièrement de nouvelles technologies de dépollution et de baisse de la consommation de carburants,
3 / entre la SNCF et les Chemins de fer iraniens dans le jumelage et l’exploitation des gares, l’assistance à de nouveaux systèmes d’exploitation de masse,
4 / entre PSA et Iran Khodro en vue de produire sur le site industriel de Téhéran à partir de 2017 et de commercialiser des véhicules de dernière génération en Iran (208, 3008, 201). L’objectif est de construire sur place jusqu’à 200 000 véhicules.
Avant l’arrivée du président Rohani et de Manuel Valls au siège du Medef, Mathias Fekl, le secrétaire d’État français au Commerce extérieur, au tourisme et des Français de l’étranger, qui les avait précédés, indiquait que « plus de 10 millions de voitures françaises roulent en Iran », dont la mythique 504. Quatre millions seraient des Peugeot, première marque au Moyen-Orient. Et PSA a déjà indiqué compter sur l’Iran pour atteindre son objectif stratégique d’un million de véhicules produits en Afrique-Moyen-Orient à l’horizon 2025. De son côté, son grand concurrent français, Renault, n’a pas manqué de rappeller, dans un communiqué de presse publié le jour même, que « l’Iran est depuis 2003 un marché d’importance significative dans sa stratégie ».
D’ici la fin du séjour en France d’Hassan Rohani, d’autres accords seront sans doute annoncés. Ainsi, les deux ministres des Affaires étrangères, Laurent Fabius et Mohammad Javad Zarif, vont conclure « deux mémorandums de coopération, l’un sur le dialogue politique et l’autre sur l’établissement d’une commission mixte économique entre les deux pays », d’après le Quai d’Orsay. De son côté, le géant du transport maritime CMA CGM indique qu’une lettre d’intention, « portant sur une coopération avec la société iranienne de transport maritime Irisl devait être signée à l’Élysée ».
François Pargny