Les prévision des grands assureurs crédits mondiaux vont dans le même sens. En 2016, les pays émergents ne seront pas épargnés par la tempête et vont même se retrouver dans son épicentre avec plusieurs facteurs négatifs : ralentissement économique (la croissance des nations émergentes a été divisée par deux entre 2010 et 2015), tensions politiques (au Moyen-Orient notamment entre l’Iran et l’Arabie saoudite), endettement croissant des entreprises (celui-ci a été multiplié par 4,5 entre 2004 et 2014 en valeur absolue), chute du prix du baril… autant de facteurs mis en évidence par le groupe Coface dans son dernier Panorama « Baromètre risque pays : les grands enjeux 2016 », publié ce 26 janvier à l’occasion de son traditionnel Colloque Risque pays, donné aujourd’hui 26 janvier à Paris, au Carrousel du Louvre. Un panorama qui ressemble à celui dresser par Euler Hermes dans ses dernières perspectives de la croissance mondiale la semaine dernière*.
Pas d’embellie pour les pays émergents
La situation des pays émergents, dont la croissance a été divisée par deux en cinq ans (3,9 % prévu en 2016), se complique davantage avec la montée de l’endettement des entreprises, sous l’effet des politiques monétaires très expansionnistes après la crise de Lehman Brothers et de la chute des prix des matières premières, alerte l’assureur-crédit dans son Panorama . Dans ce contexte, les économistes du groupe Coface ont déclassé ou mis sous perspective négative les évaluations du risque pays de dix pays émergents situés en Amérique latine (Brésil), en Afrique (Afrique du Sud, Algérie, Zambie, Tanzanie, Gabon, Namibie, Madagascar), au Moyen-Orient (Bahreïn) et en Asie (Kazakhstan).
Le Brésil, où la crise politique et la récession devraient perdurer en 2016, voit son évaluation être dégradée pour la deuxième fois en moins d’un an (voir notre article), passant de B à C. L’investissement, la consommation et l’activité industrielle sont toujours en déclin, observe Coface.
L’Algérie, dont l’économie est profondément dépendante du pétrole et du gaz et pays, et le déficit public important, est elle aussi rétrogradée par le spécialiste de l’assurance-crédit, qui déclasse son évaluation en B, après A4 assortie d’une surveillance négative.
En Afrique du Sud, où la production agricole souffre de sécheresse, la croissance devrait rester atone dans un contexte de coupures d’électricité, de dépréciation du rand et d’instabilité politique. L’évaluation est ainsi déclassée de A4 assortie d’une surveillance négative à B. En Tanzanie, la poursuite de la dépréciation du shilling face au dollar en 2016 et le climat politique difficile (annulation des élections sur l’île de Zanzibar en raison d’allégations de fraude) conduisent Coface à rétrograder la note du pays en C (après B assortie d’une surveillance négative).
À Bahreïn, le secteur privé va souffrir de l’érosion de la confiance des consommateurs et des entreprises, prédit Coface, qui déclasse l’évaluation A4 assortie d’une surveillance négative en B.
Une croissance modérée pour les pays avancés
Dans leur ensemble, les pays avancés enregistreront une croissance modérée cette année, estimée à 2 % par Coface. « Les principales inquiétudes tiennent à leur dépendance aux prix des matières premières, au ralentissement chinois ainsi qu’à la volatilité des marchés financiers », avertit l’assureur-crédit.
Fortement affecté par la chute de l’investissement dans le secteur pétrolier en raison de la baisse des recettes du secteur, le Canada est désormais évalué en A2 (contre A1). La reprise estime Coface dépendra de la croissance américaine.
A contrario, les performances du Japon sont décevantes, souligne l’assureur-crédit dans son panorama. Le Japon, dont 18 % des exportations sont destinées à la Chine, figure également parmi les victimes potentielles d’un ralentissement chinois. Une croissance faible (estimée à 0,9 % en 2016) et un risque de déflation qui persiste conduisent Coface à mettre sous surveillance négative l’évaluation A1 du Japon.
« Sans surprise, la baisse de la demande et du tourisme en provenance de la Chine continentale continuera de se faire sentir sur l’activité de Hong Kong et de Taïwan, également sous surveillance négative », détaille la société d’assurance-crédit.
Raffermissement de la croissance en zone euro
Dans la zone euro, la croissance devrait continuer de se raffermir cette année (+1,7 %, après +1,5 % en 2015), toujours tirée par la consommation et l’investissement.
En France, la croissance devrait être plus dynamique et s’établir à 1,4 % en 2016, contre 1,1 % l’année passée « comme en atteste le recul du nombre de défaillances ou encore la forte progression du nombre de créations d’entreprises », commente le spécialiste de l’assurance-crédit.
En Espagne, l’économie devrait cependant ralentir quelque peu cette année. La croissance du PIB espagnol devrait s’établir à 2,6 % en 2016, contre 3,1 % l’année dernière, selon les prévisions de Coface. La croissance de l’Italie sera, elle, favorisée par la demande intérieure et par des progrès en matière de réformes structurelles, conduisant l’assureur-crédit français à mettre une surveillance positive sur son évaluation B.
Les économistes de Coface se montrent par ailleurs optimistes s’agissant de la situation des entreprises qui s’est globalement améliorée en zone euro sur la période récente. En effet, les défaillances d’entreprises ont diminué dans les grands pays européens, de manière modérée en France, en Allemagne et en Italie (entre 3,5 et 5 % sur les neuf premiers mois de l’année 2015 comparé à la même période en 2014), mais fortement en Espagne (-26 %).
En somme, la prudence est de mise pour l’évolution des risques pays en 2016. Dans un contexte de croissance mondiale molle, prévue à 2,7 % par Coface (après 2,5 % en 2015), les risques qui sont apparus en 2015 devraient persister cette année. Au premier rang figurent les tensions politiques qui gagnent du terrain à la fois dans les pays avancés et émergents.
Venice Affre
*Conjoncture / Risques pays : « le risque de crédit est passé des pays riches aux pays émergents», selon L. Subran – See more at: https://www.lemoci.com/actualites/etudes-rapports/conjoncture-le-risque-de-credit-est-passe-des-pays-riches-aux-pays-emergents-selon-l-subran/#sthash.t3jwB2zt.dpuf
Pour en savoir plus :
Consultez le Panorama de Coface en PDF ci-joint